Reflets

Avril : saison des pluies et des conseils de classe. Comme la semaine dernière, je vais passer l'après-midi à la Méjanes en attendant la réunion du soir ; s'il ne pleut pas trop j'irai voir de plus près un mur végétal que j'ai découvert à côté du Grand Théâtre. La master class du jeudi est remise au vendredi.
Ce matin, les jours se suivent et ne se ressemblent pas, les élèves avaient mis un point d'honneur à être irréprochables, ils m'ont proposé de prendre une photo : en tout cas, c'est rassurant, ils ont le sens de l'humour et savent faire la part des choses !

En remontant de la Cité du livre, je flâne autour du Pavillon Noir ; j'aperçois  une jeune personne tombée dans les pommes. Je fais le tour de ce pavé de verre corseté d'un filigrane de béton et commets d'autres indiscrétions.

Je me sens l'esprit libre, à la bibliothèque j'ai travaillé sans presque m'en apercevoir ; une femme est venue s'asseoir en face de moi ; elle prenait une quantité de notes sur un mince carnet. Elle était si fébrile que son écriture faisait trembler la table. Quand elle est partie, un homme a pris sa place avec une pile de romans de Julien Gracq et lui prenait des notes posément, sereinement. Nous avons travaillé de conserve, en bonne intelligence. Quand la batterie de mon portable a été épuisée je me suis rendue compte que j'avais passé près de trois heures sans battre un cil. Une ancienne élève est venue me saluer, elle est ravie de ses études et part dans quelques semaines faire un stage à Hong-Kong. Je me souviens d'elle comme d'une jeune fille réservée et terriblement déterminée. Elle est épanouie, détendue, et m'embrasse : elle est devenue adulte et ça me fait plaisir.

Ce soir, Michel et Claire, sa soeur qui est bibliothécaire à Cadenet, viennent récupérer un piano électrique dont Alaïs ne veut plus se servir. Claire me parle du rendez-vous autour des Fantômes de Sénomagus au cercle des lecteurs comme d'une chose entendue mais je tombe des nues : B* avait oublié de m'en parler.

Les nues, justement, étaient spectaculaires ce soir : orage et soleil, la lumière frissonne et frisèle, un éclair me fait sursauter. J'aime ces mises en scène, je me demande quelles histoires elles vont servir.