Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Portes et Miroirs, tome II
Pages
18 février 2011

Un jour à Marseille

P1100352



















On ne se perd pas lorsqu'on ne cherche nulle part où aller.
Et vrai, je déambule entre volées d'escaliers, places vides et ruelles désertes, à l'heure de midi, dans le quartier du Panier. A la Place des Moulins, je me dis qu'il ferait bon vivre - de là on voit la mer cavaler sous le vent. J'enfile les rues au hasard, ou plutôt je me laisse guider par leur nom : rue Fontaine des vents, du Puits-neuf, du Puits-Saint-Antoine, des Repenties... J'atterris sur la Place du Séminaire d'où j'admire la cathédrale de le Major sur fond de navire en partance pour la Corse. Dans la cathédrale, on entre par des portes rouges. Passer de la lumière crue à l'ombre me donne le vertige. Je suis seule ou presque, une jeune femme porte sur un plateau couvert d'un linge brodée deux burettes de vin. Bien que poursuivant ma route vers nulle-part-en-particulier, dans la Major je me perds : je suivais le long corridor bordant la nef - admirant au passage une sorte de moucharabieh composée d'alvéoles d'albâtre si fin qu'il laisse passer la lumière d'une chapelle exposée au soleil - et je crois voir la cathédrale se dédoubler ; je suis certaine que deux nefs se tiennent en vis à vis et curieuse de voir où donnent les portes de ce côté, je me retrouve éblouie sur le parvis... par où je suis entrée. A l'heure où je tapote sur mon clavier, je ne sais toujours pas à quel moment j'ai franchi le portail qui m'a permis d'apercevoir le double inversé de la cathédrale.
Repartie, troublée, dans le labyrinthe au-dessus du Vieux-Port. Pendant la guerre les murs avaient des oreilles, de nos jours ils ont des bouches, des langues : ils parlent comme des livres.
J'achève la lecture de Transit, le roman d'Anna Seghers qui se déroule dans le Marseille de l'année 40. Le Marseille où je flâne aujourd'hui a effacé, recouvert le sien, les couleurs, les sons ont changé, même la couleur de la mer. A. Seghers à plusieurs reprise décrit l'eau bleue du port (la porte d'azur, la seule ouverte d'Europe à cette époque) ; elle est verte et sombre, limpide pourtant et plus profonde que je n'imaginais. Je distingue des barrières anti-foule enchevêtrées tout au fond qui doivent dater des dernières manifs : le métal brille encore.
P1100370

Publicité
Commentaires
Portes et Miroirs, tome II
Publicité
Portes et Miroirs, tome II
Newsletter
Derniers commentaires
Archives
Publicité