Et les hommes ?
On me demande encore pourquoi les hommes sont absents
des Fantômes de Sénomagus. Ils ne sont pourtant pas absents,
bien au contraire, c'est juste que leur présence est imprimée en creux.
Tout
de même, cela m'agace que l'on me pose cette question, alors ce matin
j'écris ces quelques phrases avant de me remettre à mon Corail qui
progresse mot à mot, comme les glaciers fondent goutte à goutte, c'est à
dire sûrement :
Le soliloque a ceci d'agaçant que les pensées suivent les fils d'une logique d'herbe folle. Jadis, j'aimais plutôt l'ordre imposé sur le chaos de certains jardins. Je me suis toujours méfié de l'état de nature, je la trouvais hostile, la nature, et la nature humaine plus que tout encore. En parler à Perpétue, je suis sûr qu'elle y trouvera du grain à moudre. Je poursuis, je me concentre sur la tâche, me raser le visage, je contorsionne mes traits, tire la peau, élimine chaque poil, la lame racle, le bruit évoque celui du coutelas de mon arrière-grand-père sur la couenne ébouillantée du porc mis à mort avant sa métamorphose en saucisson, pâtés, grattons, boudins et tripous. Ce souvenir surgit, précis, si précis qu'à nouveau je me coupe.